Le potentiel de l`acquis de Barcelone

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Le potentiel de l`acquis de Barcelone
Report
Union pour la Méditerranée
Le potentiel de l’acquis
de Barcelone
auteurs
Roberto Aliboni
George Joffe
Erwan Lannon
Azzam Mahjoub
Abdallah Saaf
Álvaro de Vasconcelos
novembre 2008 No. 03
European Union
Union européenne
Institut d’Etudes de Sécurité de l’Union européenne
Le présent Rapport a été établi à partir des contributions de Roberto Aliboni, George
Joffe, Erwan Lannon, Azzam Mahjoub, Abdallah Saaf et Álvaro de Vasconcelos. Il s’inspire
des différentes contributions des participants au séminaire organisé par l’Institut le
7 mars 2008 sous forme de table ronde sur le thème The Mediterranean Union and the
Barcelona Process (« L’initiative de l’Union pour la Méditerranée et le processus de
Barcelone »). Ce séminaire a réuni des représentants des ministères des États membres et des institutions de l’Union européenne, ainsi que des universitaires des pays
de l’Union européenne et du bassin méditerranéen. Un autre séminaire intitulé Is the
Barcelona Process at a new crossroads? (« Le processus de Barcelone est-il à nouveau à
la croisée des chemins? ») avait eu lieu le 10 septembre 2007. Nous remercions également Esra Bulut, Luis Peral et Walter Posch, chargés de recherche à l’IESUE, pour leurs
commentaires.
Les participants ont examiné les objectifs et grandes lignes de la proposition d’Union
pour la Méditerranée, ils ont passé en revue les principes, les résultats et les enjeux
du Processus de Barcelone existant et évalué les défis euro-méditerranéens, en constante évolution. Leurs débats font l’objet de deux rapports distincts, écrits par Tiago
Marques. Les questions traitées sont approfondies ici à la lumière des conclusions qui
ont été dégagées et de l’analyse complémentaire effectuée par l’Institut.
Une première version de ce Rapport a été publiée en langue anglaise en mai 2008.
Cette version française, qui reprend l’essentiel du texte anglais, tient compte des
conclusions du sommet euro-méditerranéen tenu à Paris le 13 juillet 2008.
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Union européenne
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Publié par l’Institut d’Etudes de Sécurité de l’Union européenne, imprimé à Condé-sur-Noireau (France) par
Corlet Imprimeur. Conception graphique : Metropolis (Lisbonne)
Union pour la Méditerranée : le potentiel de l’acquis de Barcelone
Résumé
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Introduction
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I. Le verre à moitié plein : institutions, politiques et propositions existantes
9
A. Processus de Barcelone : la dimension communautaire
1. Au-delà de la coopération politique intergouvernementale
2. Une communauté économique entre l’UE et ses partenaires
9
9
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B. Préserver l’acquis de Barcelone
1. L’acquis de Barcelone
2. Les objectifs de Barcelone 2010
3. Les dimensions politiques potentielles
4. La dimension d’échange entre les peuples
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C. Politique européenne de voisinage (PEV)
1. Équilibre Est-Sud
2. Compléter la PEV
3. Principes de conditionnalité positive et de différenciation de la PEV
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D. Communauté euro-méditerranéenne d’États démocratiques
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II. Enjeux essentiels
1. Le rôle de l’Islam politique
2. « Liberté » et non pas « sécurisation »
3. Mise en œuvre d’une approche positive à l’égard des migrants et de leurs communautés
4. Rejeter le « choc des civilisations »
5. Conflits et tensions régionales
6. L’impératif économique
III. De nouvelles institutions euro-méditerranéennes ?
1. Sommets réguliers des chefs d’État ou de gouvernement (G-Med)
2. La double présidence tournante
3. Un secrétariat et un comité permanent basé à Bruxelles
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IV. Créer de nouveaux programmes et instruments
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1. Lacunes du processus de Barcelone
2. Générer des projets dans la Méditerranée
3. Coopération euro-méditerranéenne accrue
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V. Créer un nouveau mécanisme financier
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VI. Un regard neuf sur les questions clés
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Conclusions
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Recommandations à court terme
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Note sur les auteurs
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I. Méthode
II. Institutions et programmes
III. Faire face aux risques potentiels
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Union pour la Méditerranée : le potentiel de l’acquis de Barcelone
Résumé
Le succès diplomatique du sommet de Paris du 13 juillet 2008 a créé les conditions
favorables pour relancer le processus de Barcelone. Pour que cela se réalise, l’acquis
du débat soulevé par les premières propositions de l’Union méditerranéenne doit
être pris en considération.
L’une des conditions préalables à la réussite de cette nouvelle initiative méditerranéenne est de déterminer clairement quel est vraiment l’acquis du processus de Barcelone. Toute nouvelle initiative telle que l’Union pour la Méditerranée devrait donc
avoir pour objectif de consolider et de renforcer l’acquis de Barcelone tout en préservant sa dimension sociale et la notion d’échange entre les peuples. À cet égard, il
ne faut pas oublier que le Partenariat euro-méditerranéen (PEM) – le « processus de
Barcelone » – est beaucoup plus qu’un simple processus intergouvernemental de coopération politique. Il implique également de recourir à l’approche communautaire.
La nécessité de réévaluer les défis que doivent relever les pays méditerranéens ainsi
que la politique de l’Union à l’égard de cette région se fait de plus en plus pressante.
Le PEM est déjà un instrument qui définit avec précision les principes fondamentaux
des mécanismes de l’Union européenne visant à instaurer la paix et une démocratie
ouverte à tous, et ces principes doivent à ce titre être préservés. En tant que modèle
pour le développement de la communauté euro-méditerranéenne d’États démocratiques, il s’accompagne d’une stratégie globale qui favorise la mise en œuvre de réformes dans les pays du Sud, créant ainsi une possibilité de coopération dans le cadre
des réseaux trans-euro-méditerranéens qui relient les sociétés civiles des deux rives
de la Méditerranée.
Si l’Union pour la Méditerranée n’est pas considérée comme venant compléter le processus de Barcelone et la Politique européenne de voisinage (PEV), elle risque de
nuire à leur visibilité et à leur efficacité. Il est fondamental pour la cohérence de
l’Union européenne que celle-ci adopte des politiques à long terme cohérentes et
efficaces à l’égard de l’Est et du Sud.
Une autre condition préalable au succès de l’initiative « Le processus de Barcelone :
Union pour la Méditerranée » est que ce processus doit faire face à un certain nombre de défis importants dans cette région : l’Islam politique, le renforcement de
la sécurité induit par les attentats du 11 septembre 2001 contre les États-Unis, le
rôle des migrants dans le processus de Barcelone, les conséquences de l’utilisation
inopportune de la notion de « choc des civilisations », la persistance des tensions et
conflits régionaux, et la nécessité de faire appliquer la règle de droit et les libertés
civiles pour un véritable développement économique et social. Dans le cadre de ce
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processus, l’Union doit également concilier ses propres exigences d’« inclusion dans
la diversité » et le fait que de nombreux Européens refusent toujours d’accepter
l’hétérogénéité de la société européenne ; sans cette prise de conscience, l’Europe ne
pourra jamais engager un dialogue constructif avec les pays du bassin méditerranéen
sur la question de l’immigration.
Il est possible de créer de nouvelles institutions, de nouveaux mécanismes et instruments dans le cadre des relations euro-méditerranéennes, mais il ne faut pas sousestimer le risque de paralysie persistante de la gestion du processus de Barcelone
résultant des antagonismes entre les différents partenaires. Les nouvelles initiatives
pourraient néanmoins être considérées comme des possibilités de renforcer le processus actuel et de s’attaquer aux problèmes qui n’ont pas été réglés, ou qui ne l’ont
pas été correctement, au cours des dix dernières années.
Le thème central de la politique méditerranéenne devrait être clairement défini et
tenir compte des intérêts, des préoccupations et des enjeux communs des pays euroméditerranéens. Il est donc devenu urgent de consulter comme il se doit les partenaires méditerranéens de l’Union européenne. Il convient également de veiller à
ne pas abandonner, au nom de la realpolitik, les mesures d’incitation aux réformes
politiques et la conditionnalité positive, de ne pas esquiver les principales questions
socio-économiques et politiques de la région méditerranéenne et d’éviter la marginalisation de la société civile dans cette région. Le principe de la conditionnalité
positive dans le cadre de la PEV devrait encourager les pays concernés à respecter le
droit international et à évoluer à travers une gouvernance démocratique.
Le sommet de l’Union méditerranéenne de Paris a créé les conditions politiques pour
relancer le processus de Barcelone. Mais les grands défis identifiés dans le présent
Rapport demeurent ; s’ils ne sont pas relevés, il n’y aura d’intégration régionale ni
Nord-Sud ni Sud-Sud et les objectifs fixés par le sommet ne seront pas atteints.
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Union pour la Méditerranée : le potentiel de l’acquis de Barcelone
Union pour la Méditerranée :
le potentiel de l’acquis de Barcelone
Introduction
L’initiative de la France en faveur de l’Union pour la Méditerranée a relancé le débat
sur le processus de Barcelone – le Partenariat euro-méditerranéen (PEM) – et sur
les relations euro-méditerranéennes dans un contexte élargi. Ce débat a permis de
dresser à nouveau le bilan de ce qui a été réalisé dans le cadre de l’initiative méditerranéenne de l’Europe et de déterminer ce qui doit être fait pour renforcer l’initiative initiale – une démarche particulièrement souhaitable. La proposition initiale
d’Union méditerranéenne présentée par la France était limitée aux États riverains
de la Méditerranée car ils sont concernés plus directement par les affaires méditerranéennes. Il était proposé de créer une structure administrative réunissant ces
États dans un processus de codéveloppement, avec une coprésidence Nord-Sud. Ces
nouvelles institutions devaient gérer et financer des projets de développement ayant
des répercussions au niveau régional pour les États concernés.
Cette proposition a suscité une certaine inquiétude parmi les États membres de
l’Union européenne, car elle sous-entendait une distinction entre les États de l’Union
selon qu’ils étaient ou non riverains de la Méditerranée pour la politique menée à
l’égard de la périphérie méridionale de l’Europe – une priorité de l’Union. Il importe
dans ce contexte de noter que, selon la Stratégie européenne de sécurité adoptée en
décembre 2003, « [l]es intérêts de l’Union européenne exigent un engagement continu
à l’égard des partenaires méditerranéens grâce à une coopération plus efficace dans
les domaines de l’économie, de la sécurité et de la culture, dans le cadre du processus de Barcelone. Un engagement plus large avec le monde arabe doit également être
envisagé ». Après un débat intense entre les vingt-sept États membres de l’Union sur
la viabilité de l’initiative, puisque celle-ci ne concernait que les pays riverains de la
Méditerranée proprement dite, un consensus a été dégagé en mars 2008 par le Conseil
européen qui a « approuvé le principe d’une Union pour la Méditerranée qui englobera les États membres de l’UE et les États riverains de la Méditerranée qui ne sont
pas membres de l’UE »1. Une communication de la Commission européenne a ensuite
1. Annexe I des Conclusions de la présidence du Conseil européen de Bruxelles des 13 et 14 mars 2008
sur le « Processus de Barcelone : Union pour la Méditerranée ».
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été publiée en mars 20082 et le sommet des chefs d’Etat et de gouvernements a eu lieu
à Paris le 13 juillet. La déclaration de Paris doit être désormais considérée comme
l’Acte fondateur de l’Union pour la Méditerranée3.
Il reste toutefois à établir précisément les avantages que présente la nouvelle proposition pour les relations euro-méditerranéennes – dont le processus de Barcelone
est un élément essentiel. Ce processus mérite à ce sujet un examen plus poussé et ne
doit pas être simplement considéré comme un échec. Il faut pour cela réexaminer le
débat très large et approfondi tenu lors des réunions préparatoires du sommet euroméditerranéen de Barcelone de 2005. Ce sommet, à l’occasion duquel a été célébré le
dixième anniversaire du PEM, a peut-être échoué en raison de l’absence de la grande
majorité des chefs d’État des pays du Sud de la Méditerranée, mais l’analyse complexe
du PEM menée au cours des préparatifs de cet événement devrait être reconsidérée dans toute initiative future, en particulier si l’objectif est de redynamiser les
relations euro-méditerranéennes. Soulignons à ce sujet la participation active des
représentants de la société civile des deux rives du bassin méditerranéen aux débats
du sommet de Barcelone 2005.
Ainsi, pour que l’Union pour la Méditerranée soit un succès, il importe de prendre
en considération à la fois les résultats du processus de Barcelone et les raisons de
ses lacunes, compte tenu notamment du programme ambitieux du processus initial. La
tendance à « tout recommencer depuis le début » pourrait se révéler très coûteuse.
En conséquence, nous commençons cette analyse de la capacité de l’Union pour la Méditerranée à relancer les relations euro-méditerranéennes en examinant l’état actuel
du PEM et ses perspectives d’avenir. L’un des objectifs du présent Rapport est de
poser quatre questions fondamentales :
i.
ii.
iii.
iv.
Quel doit être l’élément central de la politique méditerranéenne ?
Comment le cadre de coopération euro-méditerranéen doit-il être structuré ?
Comment doit-on lier sécurité et réforme ?
Comment les migrants peuvent-ils devenir des acteurs à part entière du
­Partenariat ?
2. Commission des Communautés européennes, Communication de la Commission au Parlement européen
et au Conseil, « Le Processus de Barcelone : Union pour la Méditerranée », Bruxelles, 20/05/08, COM(2008)
319/4 ; http://ec.europa.eu/external_relations/euromed/docs/com08_319_fr.pdf.
3. Déclaration commune du sommet de Paris pour la Méditerranée, Paris, 13 juillet 2008 :
http://www.ue2008.fr/webdav/site/PFUE/shared/import/07/0713_declaration_de_paris/Declatation_
du_sommet_de_Paris_pour_la_Mediterranee-FR.pdf.
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Union pour la Méditerranée : le potentiel de l’acquis de Barcelone
I. Le verre à moitié plein : institutions,
politiques et propositions existantes
Il importe de rappeler que des institutions et des politiques communes ont été élaborées dans la région méditerranéenne depuis plus d’une dizaine d’années et que cet
acquis doit être pris en compte dans une nouvelle initiative.
A. Processus de Barcelone : la dimension communautaire
Le Partenariat euro-méditerranéen est beaucoup plus qu’un simple processus intergouvernemental de coopération politique : il inclut également l’approche communautaire, qui a été appliquée avec succès à l’élargissement, pour développer les relations euro-méditerranéennes.
1. Au-delà de la coopération politique intergouvernementale
Les accords d’association euro-méditerranéens, par exemple, établissent un ensemble
de normes dont l’objectif est de faciliter l’inclusion euro-méditerranéenne, même si
l’élargissement de l’Union n’est pas envisagé à long terme. Dans ce sens, ces accords
sont les héritiers de l’expérience de l’intégration européenne.
De fait, ils s’appuient sur les politiques existantes de l’Union4 et encouragent les
États concernés à tirer parti des résultats obtenus par la Communauté dans un certain nombre de domaines. À cet égard, la Cour de justice européenne de Luxembourg
a déjà traité un grand nombre d’affaires concernant les aspects sociaux5 des accords
conclus avec les pays du Maghreb et avec la Turquie. Par ailleurs, dans sa deuxième phase d’activité, le processus de Barcelone était axé sur la création d’institutions communes, notamment l’Assemblée parlementaire euro-méditerranéenne et la
Fondation pour le dialogue entre les cultures, deux institutions qui souffrent encore
malgré tout d’un net déficit dans la société civile des deux côtés de la Méditerranée.
Plus important encore, le Partenariat a donné lieu à un grand nombre d’initiatives
entre les peuples auxquelles ont participé des centaines d’organisations non gouvernementales des deux rives de la Méditerranée.
4. Par exemple, les articles de l’accord d’association Euromed sur la concurrence sont semblables à ceux
du traité CE.
5. Sécurité sociale ou droits à pension par exemple.
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2. Une communauté économique entre l’UE et ses partenaires
Cette approche a été renforcée avec le lancement de la Politique européenne de voisinage (PEV), qui a permis aux pays du sud de la Méditerranée de disposer des moyens
nécessaires pour pouvoir s’intégrer dans l’espace économique européen, s’ils le souhaitaient. La Commission européenne a joué un rôle déterminant dans l’élaboration
de cette approche, en particulier en ce qui concerne la PEV et le programme de financement MEDA dans le cadre du processus de Barcelone.
En conséquence, comme l’indique la communication de la Commission européenne
­relative au renforcement de la Politique européenne de voisinage, présentée en 2006,
il existe à présent une « vision à long terme de l’émergence d’une communauté économique entre l’Union européenne et ses partenaires de la PEV, dont certains ­aspects
ont déjà été mis en œuvre sur le pourtour méditerranéen par l’intermédiaire de l’accord d’Agadir ». La Commission européenne a en outre souligné qu’à long terme, « le
cheminement vers une communauté économique de voisinage élargie impliquerait,
notamment, l’application de cadres réglementaires communs, un accès amélioré aux
marchés des biens et des services entre partenaires de la PEV et certains aménagements institutionnels, tels que des mécanismes de règlement des différends »6.
B. Préserver l’acquis de Barcelone
Malgré l’accord politique donné à l’Union pour la Méditerranée, il reste à résoudre
plusieurs problèmes techniques. Les principales orientations sur les moyens d’y parvenir devraient être définies sur la base de l’acquis du processus de Barcelone en
consolidant et en renforçant ce qui a déjà été réalisé et ce qui reste à accomplir.
1. L’acquis de Barcelone
L’une des conditions préalables à la réussite de la nouvelle initiative méditerranéenne est de déterminer clairement quel est véritablement l’acquis du processus de
Barcelone. Même si cet acquis n’a pas encore de définition juridique, il englobe de
toute évidence un large ensemble d’éléments, y compris des éléments de droit communautaire. Les plus importants sont :
i. la déclaration de Barcelone ;
ii. les accords Euromed, les protocoles et autres actes juridiques qui les accompagnent ;
6. Communication de la Commission relative au renforcement de la politique européenne de voisinage,
COM(2006)726 final, Bruxelles, 4 décembre 2006, p.6.
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Union pour la Méditerranée : le potentiel de l’acquis de Barcelone
iii. le droit dérivé (règlements MEDA I et II, Instrument européen de voisinage et
de partenariat) ;
iv. les décisions de la Cour de Luxembourg sur les accords Euromed ;
v. les autres déclarations ministérielles ;
vi. les institutions Euromed et les nombreux réseaux de la société civile, soutenus
par le Partenariat, dans le domaine des initiatives entre les peuples ;
vii. le programme de travail quinquennal de la Commission, arrêté en 2005, et le
Code de conduite en matière de lutte contre le terrorisme.
Il convient de souligner que cette liste n’est pas exhaustive de ce que devrait comprendre l’acquis juridique de Barcelone qui, tout comme l’acquis communautaire, ne
cesse d’évoluer. Elle ne tient pas entièrement compte du vaste acquis politique qui
a permis de réunir, dans certains domaines, les sociétés des deux rives et d’engager
entre diplomates, acteurs politiques et société civile un processus de socialisation
dont il est difficile de mesurer l’incidence, pourtant non négligeable.
2. Les objectifs de Barcelone 2010
Un autre acquis, potentiel, du processus de Barcelone – sans lequel le succès de
l’Union pour la Méditerranée est impossible – est que bon nombre des objectifs
concrets fixés en 1995 (tels que la Zone de libre échange ou le Pacte de stabilité et de
sécurité), conçus pour être atteints à l’horizon 2010 seulement, sont encore en cours
de réalisation. La mise en place – essentielle – de la zone régionale de libre échange
du Sud doit également être achevée d’ici 2010. Ces objectifs comprendront donc à la
fois le libre échange dans le bassin méditerranéen et l’intégration des marchés du
Sud, réalisant ainsi une zone de libre échange méditerranéenne (MEFTA).
Les accords MEFTA ne sauraient toutefois se limiter aux objectifs purement commerciaux qu’implique le libre échange. Ils impliquent en effet que la règle de droit
fasse partie intégrante du projet et doivent donner lieu à un contrat social avec les
États et les populations concernés afin de réduire les inégalités que peut créer un tel
processus. Le grand intérêt de ce projet résiderait dans l’instauration de la justice
sociale et l’élimination de la pauvreté et du chômage. Il serait également essentiel
de préserver l’acquis démocratique du processus de Barcelone et de ne pas céder à la
tentation de l’écarter au nom de la realpolitik, du relativisme culturel ou de préoccupations d’ordre commercial. Enfin, il importe de veiller à renforcer le processus de
rapprochement et l’association active entre les sociétés des deux rives en définissant
des objectifs spécifiques à cet effet.
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3. Les dimensions politiques potentielles
Il est possible de déterminer l’acquis potentiel du PEM à partir de la déclaration
de Barcelone de 1995. Ce texte définit expressément comme un objectif partagé la
réalisation d’un « espace commun de paix et de stabilité » fondé sur les principes
fondamentaux du droit international. Il réaffirme également des « objectifs communs
en matière de stabilité interne et externe ». C’est sur cette base que les signataires ont fondé leur « déclaration de principe » qui comportait l’engagement de
« (...) développer l’État de droit et la démocratie dans leur système politique » et
de « respecter les droits de l’homme et les libertés fondamentales, ainsi que [de]
­garantir l’exercice effectif et légitime de ces droits et libertés, y compris la liberté
d’expression, la liberté d’association à des fins pacifiques et la liberté de pensée, de
conscience et de religion, individuellement ainsi qu’en commun avec d’autres membres du même groupe, sans aucune discrimination exercée en raison de la race, la
nationalité, la langue, la religion ou le sexe ».
L’acquis dans son ensemble représente un potentiel énorme, notamment parce que le
PEM a toujours été tourné vers les résultats futurs, dans l’objectif de bâtir progressivement une véritable communauté méditerranéenne, même si cette construction
s’effectue à des rythmes différents en fonction des capacités politiques et économiques de chacun de ses membres. C’est au fond un aspect qui a été pris en compte dans
les plans d’action de la PEV (voir ci-après) et les accords d’association du PEM. Cela
a facilité les initiatives en matière de coopération qui ont rapproché les sociétés
civiles de la région méditerranéenne, permettant d’aborder la question des droits
des femmes à Istanbul lors d’une réunion ministérielle en 2006, et ouvrant la voie à
l’adoption de la facilité de financement consacrée à la gouvernance en 2005.
Le PEM constitue également un cadre qui permet de faire connaître aux partenaires
du sud de la Méditerranée les aspects normatifs des politiques de l’Union europé­
enne. Il garantit en outre la dimension diplomatique des relations entre les partenaires du Sud et du Nord, ce qui renforce son incidence au niveau régional. Il a également permis d’établir un cadre pour la sécurité régionale qui, même s’il n’est pas
encore solide, fonctionne, et a créé un sens de la solidarité parmi ses membres. Dans
ce sens, le PEM, même s’il est susceptible d’être modifié, est déjà un instrument qui
définit précisément les critères fondamentaux des mécanismes de l’Union européenne
visant à instaurer la paix et une démocratie ouverte à tous, et il doit à ce titre être
préservé.
Il y a en outre, en matière de sécurité, un acquis commun à tous les États partenaires euro-méditerranéens. Bien qu’encore assez limité, il contient des éléments importants, notamment le consensus dont fait l’objet la structure régionale du PEM – cette
struc­ture, qui regroupe Israël et les Palestiniens, est en soi une mesure de confiance
mutuelle et une base solide pour la coopération régionale au Proche-Orient une fois
12
Union pour la Méditerranée : le potentiel de l’acquis de Barcelone
la paix instaurée dans la région. Dans ce sens, l’acquis euro-méditerranéen dans le
domaine de la sécurité repose sur la conviction qu’il est possible de bâtir un espace
de paix euro-méditerranéen inspiré par des principes et des normes reposant sur
l’inclusion démocratique. Cela garantirait des relations internationales sûres, axées
sur des principes d’association politique et économique et ne faisant pas intervenir
la puissance politique en tant que moyen d’action entre États voisins. Cet acquis dans
le domaine de la sécurité suppose que la réforme politique, le rôle accru des citoyens
dans les relations internationales et l’interdépendance économique sont des conditions
essentielles pour garantir la sécurité collective. Il est implicite dans la déclaration de
Barcelone, et repose essentiellement sur le lien entre la sécurité et la convergence économique, politique et sociale. C’est un acquis que les membres n’ont pas été en mesure
de prévoir de manière explicite sur une feuille de route à propos de la sécurité et de
la coopération dans la région méditerranéenne, comme cela était prévu.
Dans ce contexte, les résultats du processus de Barcelone obtenus à ce jour sont loin
d’avoir satisfait les attentes au sein de l’Union européenne. Par ailleurs, les relations
euro-méditerranéennes ont considérablement évolué en raison de toutes les conséquences qu’ont eues au niveau stratégique les évolutions des relations internationales, comme les attentats du 11 septembre – et la réaction des Américains – ainsi que
des changements survenus dans l’Union elle-même, tels que l’élargissement et l’échec
du renforcement de la base politique de l’Union qu’aurait permis l’adoption de la
Constitution européenne. En conséquence, il devient de plus en plus urgent de réévaluer les enjeux auxquels sont confrontées la région méditerranéenne et la politique
de l’Union à l’égard de cette région.
4. La dimension d’échange entre les peuples
Toute nouvelle initiative telle que l’Union pour la Méditerranée doit donc viser à
consolider et à renforcer l’acquis de Barcelone tout en préservant sa dimension
­sociale – l’un des grands succès du processus de Barcelone – car elle peut lui donner
une dimension déterminante. Si les gouvernements sont invités à faire avancer le
processus, le PEM lui-même exige un engagement en développant les relations entre
les peuples.
L’idée sous-jacente de cet aspect du processus est que, pour pouvoir assurer la sécurité régionale, il faut renforcer les relations entre les peuples de la région et leur
permettre de coexister malgré leurs différences culturelles. Cette notion d’unité dans
la diversité appliquée aux relations entre les sociétés méditerranéennes et européennes – un dialogue entre les peuples parallèlement au dialogue intergouvernemental – est un autre élément clé de l’acquis de Barcelone qu’il convient de souligner
et de renforcer. La pleine participation de l’ensemble des sociétés civiles des pays du
PEM est à cet égard indispensable.
13
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C. Politique européenne de voisinage (PEV)
La Politique européenne de voisinage (PEV) représente une nouvelle initiative
­importante de l’Union à la périphérie de l’Europe – à l’Est et au Sud – et pourtant,
lors du récent débat sur l’Union pour la Méditerranée, elle a été presque entièrement
négligée. Cela est d’autant plus préoccupant que cette Politique est actuellement la
force motrice, au niveau bilatéral, des réformes et de la coopération financière à la
périphérie méridionale de l’Union.
1. Équilibre Est-Sud
Depuis le Conseil européen de Essen en 1994, les stratégies de proximité de l’Union
– politiques en faveur de ses voisins situés à la périphérie – sont fondées sur la
notion d’équilibre européen Est-Sud. Dans la pratique, cela signifie que toute nouvelle initiative en faveur de l’Est doit être contrebalancée par une initiative parallèle en faveur du Sud, et vice-versa. Cet équilibre était un élément essentiel du
consensus franco-allemand après la fin de la Guerre froide, sur les priorités ­futures
de l’Union européenne, après l’adoption du traité de Maastricht et la mise en place
de la Politique étrangère et de Sécurité commune. C’est ce qui a été souligné par la
Pologne et la Suède avec le lancement d’une initiative de partenariat pour l’Europe
orientale.
En outre, compte tenu du cadre actuel de coopération, il sera très difficile de négliger des questions telles que l’initiative « Synergie de la mer Noire », le Caucase du
Sud ou les nouveaux États membres comme la Bulgarie et la Roumanie dans le contexte
de la PEV, car l’une des clés de son succès est la participation de tous. En outre, les
principaux objectifs de la politique devraient être définis en termes d’objectifs communs, et non en termes d’objectifs européens ou nationaux.
On peut comprendre que certains États membres de l’Union européenne puissent percevoir la Méditerranée comme une région lointaine, voire étrangère, sans incidence
sur leurs intérêts politiques et économiques directs. Pourtant, avec le temps, ces
pays ont pu mieux se rendre compte que l’acquis communautaire reflète les intérêts
de l’Union européenne et qu’il ne peut être fragmenté. Ainsi la raison pour laquelle la
dimension méditerranéenne de l’acquis importe pour les pays de la Baltique est que
la dimension nordique de ce même acquis importe elle-même pour l’Europe du Sud.
Certains États membres ont adhéré rapidement à cette idée, d’autres auront besoin
d’un peu plus de temps. De façon générale, toutefois, l’acquis communautaire, qui
faisait partie intégrante des traités d’adhésion à l’Union européenne, a été accepté
par tous les États membres, anciens ou nouveaux.
Par ailleurs, en intégrant surtout des pays d’Europe centrale et d’Europe du Sud-Est,
l’élargissement a amené certaines parties de l’Europe du Sud à craindre que l’équi14
Union pour la Méditerranée : le potentiel de l’acquis de Barcelone
libre initial au sein de l’Union sur lequel étaient fondées les politiques méditerranéennes se déplace vers l’Est. Ce sentiment a été l’un des moteurs de la proposition
de la France en faveur d’une Union pour la Méditerranée, même si la France a finalement accepté de placer son initiative sous l’égide de l’Union européenne. Bref, il
est fondamental, pour la cohésion de l’Union européenne, d’élaborer des politiques
communes à long terme cohérentes et efficaces à l’égard à la fois de l’Est et du Sud,
et c’est la raison pour laquelle ces politiques ne peuvent pas se permettre d’ignorer
les partenaires du Sud de la Méditerranée.
2. Compléter la PEV
Si l’Union pour la Méditerranée n’est pas considérée comme complétant le processus
de Barcelone et la PEV, elle risque de nuire à leur visibilité et à leur efficacité pour
les raisons suivantes :
i.
les objectifs et l’approche du processus de Barcelone sont bien connus, non
seulement des élites gouvernementales, mais aussi des secteurs d’influence de
la société civile dans le Sud en particulier ;
ii. la PEV elle-même a été lancée le 1er janvier 2007 et elle dépend des perspectives financières 2007-2013 de l’Union, car l’Instrument européen de voisinage
et de partenariat est à présent le seul mécanisme financier pour l’ensemble
de la région couverte par la Politique européenne de voisinage. En outre,
plusieurs rapports, plans d’action et rapports de suivi nationaux ont déjà été
adoptés dans ce cadre ;
iii. le processus de Barcelone – le PEM – a déjà été intégré dans la PEV, même si
deux États au moins (l’Algérie et la Syrie) demeurent hors de la structure élargie de la PEV.
Autrement dit, toute nouvelle initiative doit tenir compte de ces instruments et de
leurs objectifs particuliers. À cet égard, il convient de noter que, parmi les documents présentés au Conseil européen de mars 2008, figurait un rapport établi par la
présidence slovène et consacré aux progrès accomplis dans le cadre de la PEV.
3. Principes de conditionnalité positive et de différenciation de la PEV
Le processus de Barcelone : Union pour la Méditerranée (PB-UM) ne pourra aboutir
que s’il est effectivement lié à la PEV, notamment parce que cela permettra de définir
le rythme d’intégration à l’Europe des États partenaires du Sud. Un aspect important a été l’introduction du principe de « différenciation » entre États pour leur
intégration dans l’Union, parallèlement à l’application de celui de « conditionnalité
positive » pour soutenir les États qui souhaitent faire avancer plus rapidement leurs
relations avec l’Union. Le Maroc, par exemple, a ainsi pu évoluer vers un « statut
avancé » dans le cadre du PEM/PEV, grâce auquel il pourra accéder à des politiques
15
ISSReportNo.03
et à des programmes européens particuliers. Il est prévu qu’Israël bénéficie de dispositions similaires. Le principe de conditionnalité positive devrait mettre l’accent
sur l’engagement que prennent les États dans le cadre de la PEV, notamment ceux
qui jouissent d’un statut avancé, de respecter la règle de droit, d’évoluer vers une
gouvernance démocratique et de respecter le droit international. Bien que la nature
de la PEV limite les avantages que pourraient en retirer les États participants, les
­retombées bénéfiques en matière de coopération économique, sociale et technologique seraient considérables.
D. Communauté euro-méditerranéenne d’États démocratiques
Pour pouvoir s’appuyer sur les institutions et politiques existantes, il est intéressant également d’examiner le modèle de futur espace méditerranéen intégré qui a
été proposé par un groupe d’experts de l’Union européenne et des pays partenaires
du Sud en vue de créer une communauté euro-méditerranéenne d’États démocratiques. Les détails de la proposition sont exposés dans un rapport établi par le réseau
­EuroMeSCo pour le sommet de Barcelone de 2005, à la demande des ministres des
affaires étrangères des États du Partenariat euro-méditerranéen7.
Selon cette proposition, l’objectif commun des États membres serait la mise en place
d’une gouvernance démocratique. Les détracteurs de cette proposition de communauté
d’États démocratiques l’ont jugée irréaliste en raison de la nature autoritaire de plusieurs régimes politiques du Sud de la Méditerranée. Cette critique ne tient toutefois
pas compte du fait que les objectifs du Partenariat euro-méditerranéen ne pourront
être atteints qu’à long terme et qu’ils seront modulés en fonction des besoins et des
attentes d’une large proportion des sociétés civiles de cette région. En outre, cette
stratégie part du principe que les gouvernements des États du Sud entreprendront des
réformes politiques conformément à l’objectif qu’ils ont déclaré vouloir poursuivre.
Elle est très différente de celle suivie par l’administration Bush avec l’initiative de
Grand Moyen-Orient, et la tentative catastrophique d’imposer à l’Irak la démocratie
par la force, dans l’espoir d’une « contagion démocratique » dans toute la région.
En fait, le modèle utilisé pour la communauté euro-méditerranéenne d’États démocratiques comprend une stratégie globale qui encourage les réformes dans le Sud. La coopération devient ainsi possible à travers les réseaux trans-euro-méditerranéens reliant les
sociétés civiles des deux rives de la Méditerranée. Par ailleurs, aucun État ne serait exclu
du fait de la nature de son régime car l’achèvement de cette communauté serait un projet
à long terme fondé sur l’engagement commun pris en 1995 par l’ensemble des participants de « développer l’État de droit et la démocratie dans leur système politique ».
7. « Barcelona Plus : Vers une communauté euro-méditerranéenne d’États démocratiques », rapport
EuroMeSCo, avril 2005. Voir: http://www.euromesco.net/media/barcelonaplus_en_fin.pdf.
16
Union pour la Méditerranée : le potentiel de l’acquis de Barcelone
II. Enjeux essentiels
L’initiative PB-UM renouvelée devrait régler un certain nombre de questions que le
processus de Barcelone n’a pas encore permis de résoudre, mais qui n’en sont pas
moins essentielles pour la région méditerranéenne.
1. Le rôle de l’Islam politique
Un des principaux obstacles à la progression du processus de Barcelone a été
­l’incapacité, des deux côtés de la Méditerranée, à faire face à la montée politique des
forces islamistes dans les pays du Sud. C’est l’un des grands échecs du passé et cet
aspect doit figurer au centre de tout débat sur l’avenir du processus ou sur les nouvelles initiatives qui lui sont associées, comme l’Union pour la Méditerranée. La stratégie de certains gouvernements des pays du Sud qui consistait à marginaliser les
Islamistes et leurs adeptes au sein de la société civile a été soutenue en Europe, ce
qui a eu pour effet de marginaliser également les secteurs politiques non ­islamistes
qui œuvrent en faveur des réformes démocratiques et des libertés.
Le processus de Barcelone est donc perçu à l’heure actuelle dans un certain nombre de
pays comme le maintien du statu quo au lieu d’apporter une contribution significative aux réformes politiques. Cela a gravement entamé sa légitimité dans la région du
sud de la Méditerranée. Par ailleurs, un des principes fondamentaux de toute réforme
efficace est de veiller à ce que la société civile et les partis politiques soient pleinement associés au processus de réforme politique. Dans des pays comme le Maroc ou la
Jordanie, les partis islamistes participent déjà à la vie politique.
2. « Liberté » et non pas « sécurisation »
La décision prise d’élargir la Communauté économique européenne (CEE) en 1981 et en
1986 à la Grèce, au Portugal et à l’Espagne a été motivée entre autres par le souci de
veiller à la stabilité démocratique et à la sécurité interne de l’Union europé­enne. La
même logique a prévalu encore davantage avec les pays d’Europe centrale et orientale
après l’effondrement du communisme. À l’époque, on pensait que, si l’Union n’était pas
parvenue à intégrer les pays d’Europe centrale et orientale en les aidant à se ­doter
d’une gouvernance démocratique, le système de cohésion démocratique et ­sociale mis
en place grâce à l’Union aurait pu en pâtir. Cette idée, en substance, a sous-tendu par
la suite la nature de l’approche de l’Europe à l’égard de la Méditerranée. C’est pour
cette raison que l’Union a lancé le processus de Barcelone sous la forme d’un cadre
diplomatique d’inclusion et de coopération devant favoriser les réformes politiques
et économiques. Ces réformes avaient pour objet de permettre aux pays du bassin méditerranéen de résoudre leurs conflits et de développer leur économie.
17
ISSReportNo.03
Autrement dit, l’un des principes de base de la notion de sécurité européenne est
qu’elle dépend de la capacité de l’Union à encourager les réformes politiques et économiques à l’étranger. Cet élément de l’acquis européen s’applique aussi bien au PEM
qu’à la politique euro-méditerranéenne en général. Toutefois, l’acquis en matière de
sécurité et de réformes est remis en question en ce qui concerne la Méditerranée,
essentiellement par deux faits nouveaux. D’abord, le fait que les partenaires du PEM
ne sont pas parvenus à s’entendre à Marseille en 2000 sur une base commune dans le
domaine de la sécurité ; ensuite, la tendance sécuritaire qui a fait suite aux attentats
du 11 septembre 2001, puis à Madrid et à Londres.
Après l’échec de la conférence de Marseille – où il est apparu que le type de Partenariat euro-méditerranéen que les Européens attendaient se révélait très difficile à
mettre en place –, les gouvernements européens du Partenariat euro-méditerranéen
ont renvoyé les réformes en matière de sécurité à l’arrière-plan de la scène diplomatique. La Commission, en revanche, a poursuivi son programme de promotion des
réformes dans les pays du sud du Partenariat euro-méditerranéen, avec de nouvelles
idées et de nouvelles politiques qui ont été ensuite incorporées dans une vision plus
étroite de la PEV. Ce programme a toutefois fortement pâti de l’évolution des perceptions après les attentats du 11 septembre aux États-Unis. Certains gouvernements du
sud ont estimé que ces attentats démontraient le bien-fondé de leurs politiques de
répression envers les opposants islamistes – qu’ils définissaient comme une menace
dans la lutte contre le terrorisme. Le fait que les États-Unis, la plus grande démocratie du monde, en viennent à dissocier « justice » et « guerre contre la terreur »
leur semblait justifier leurs stratégies, ce qui a contribué à affaiblir l’approche de
l’Union fondée sur l’État de droit. Les arguments en faveur du statu quo sont devenus
plus populaires mais n’en étaient pas moins préjudiciables pour les politiques de
l’Union européenne dans la région.
Ce point mérite d’être examiné de manière plus approfondie. Le cadre Justice et
Affaires intérieures (JAI), que l’Union européenne a élaboré parallèlement à la Politique étrangère et de Sécurité commune (PESC), repose sur l’idée d’un espace commun
de liberté, de justice et de sécurité dans lequel les dimensions externes et internes
de la politique deviennent les deux faces d’une même pièce. Cependant, l’approche
sécuritaire ne permet pas aux principes de liberté d’être correctement appliqués
dans les relations extérieures, y compris avec les pays du bassin méditerranéen. Dans
le contexte euro-méditerranéen, la popularité croissante d’une approche sécuritaire
de la migration, de plus en plus présentée comme une composante de la menace dans
le débat stratégique européen, est particulièrement néfaste pour la légitimité de
l’Union européenne en tant que puissance normative. Elle tend même parfois – ce
qui est encore plus préoccupant – à être interprétée comme une forme d’adhésion
à l’idée que les Européens d’origine musulmane constituent une menace potentielle
pour la sécurité, selon l’image qu’en donnent les politiques des partis populistes
xénophobes.
18
Union pour la Méditerranée : le potentiel de l’acquis de Barcelone
La sécurisation risque d’entraver la promotion de la réforme politique dans le Sud,
qui est précisément l’un des objectifs du PEM. Elle restreint, par exemple, la libre
circulation des migrants au lieu de contribuer à l’assouplir. Le consensus européen
sur la Méditerranée, qui était fondé dans les années 1990 sur des hypothèses conceptuelles et politiques claires, repose aujourd’hui sur une approche beaucoup plus
­ambiguë. C’est un point qui doit être éclairci afin de maintenir un juste équilibre
entre les exigences de sécurité à court terme (où la sécurisation peut avoir sa place)
et les exigences à long terme (où la promotion de la réforme devrait être l’objectif
fondamental). Le résultat serait clair : la sécurité par la réforme ; la démocratie et la
liberté au sein de l’UE et de ses voisins, ainsi que dans un environnement extérieur
plus large. Ces résultats et le consensus européen à leur sujet pourraient être compromis par la politique de sécurisation croissante menée actuellement.
3. Mise en œuvre d’une approche positive à l’égard des migrants et de leurs
communautés
Les migrants sont des acteurs du processus de Barcelone en tant que migrants, et non
en tant que menace pour la sécurité. De fait, traiter la question de la migration selon
les principes et les valeurs de la Déclaration de Barcelone a représenté un défi de
taille pour les relations euro-méditerranéennes, et à plus forte raison maintenant
que la question de la migration occupe une place centrale dans le discours politique
et dans le domaine de la sécurité en Europe. Par ailleurs, le processus d’intégration
euro-méditerranéenne en une région unique ne pourra pas se faire si la dimension
humaine en est exclue, notamment si « l’autre » est perçu comme un problème et non
comme une chance. Il est de la plus haute importance de traiter les communautés de
migrants comme des acteurs à part entière de la coopération euro-méditerranéenne.
Les fonds qu’ils envoient génèrent des investissements ; eux-mêmes peuvent à leur
tour contribuer aux transferts de technologie, voire faire passer en Afrique du Nord
leur vision et leur expérience de l’Europe. Simultanément, il est essentiel de mettre
fin aux comportements xénophobes à l’égard de ces communautés de migrants en Europe.
Cette question a eu des effets néfastes sur la capacité du processus de Barcelone à rendre les migrants acteurs des relations euro-méditerranéennes et cet échec a contribué
à la montée de la xénophobie dans les pays européens. L’un des principaux objectifs
de l’Union pour la Méditerranée doit donc être de changer cette approche à l’égard
à la fois de la migration et des communautés qui en sont issues afin de dynamiser la
­dimension humaine du Partenariat. L’Union proposée devrait également faire de la
lutte contre la xénophobie l’une de ses priorités, conformément aux principes énoncés
dans la déclaration de Barcelone, dans laquelle il est clairement précisé que les partenaires « soulignent l’importance de lutter résolument contre les phénomènes racistes
et xénophobes et contre l’intolérance et conviennent de coopérer à cette fin ».
19
ISSReportNo.03
4. Rejeter le « choc des civilisations »
Bien qu’il soit à la mode d’expliquer les crises survenant dans le bassin méditerranéen à la lumière du concept de « choc des civilisations » de Samuel Huntington,
l’hostilité naturelle entre civilisations est une vision que rejette le PEM. Ce que
­recherche le Partenariat est au contraire une l’« inclusion dans la diversité », fondée
sur les valeurs communes approuvées lors de la conférence de Barcelone en 1995.
Des polémiques telles que l’« affaire des caricatures » ont largement contribué à
répandre les thèses selon lesquelles la dimension culturelle est primordiale dans les
relations internationales. Ces thèses s’appuient sur l’idée que les libertés fondamentales et la démocratie sont incompatibles avec l’Islam. Mais les difficultés liées à
l’incompatibilité entre civilisations ne sont pas les véritables problèmes auxquels se
heurtent les initiatives politiques fondées sur des idées d’unité dans la Méditerranée. En fait, les sociétés du Sud sont profondément marquées par les sociétés civiles
qui luttent pour les réformes, les droits de l’homme et le changement politique en
faveur de la démocratie.
En effet, l’Union pour la Méditerranée doit accepter que les véritables acteurs dans
cette région ne sont pas les civilisations, mais les gouvernements et les partis
­politiques, la société civile et les entreprises, qui ont tous des intérêts extrêmement
différents. Si chaque individu se caractérise par des identités et des intérêts multiples – droits de l’homme, droits de la femme ou espoir de développement économique
par exemple –, il en a beaucoup en commun avec d’autres individus, dans le Nord et
dans le Sud de la Méditerranée. Ces affinités communes sont la seule base solide de
l’interaction et de la coopération euro-méditerranéenne.
5. Conflits et tensions régionales
Toute initiative concernant la Méditerranée, ancienne ou récente, préconisant la coopération politique et l’intégration Sud-Sud continuera à rencontrer d’énormes difficultés en raison des tensions politiques entre l’Algérie et le Maroc au sujet du Sahara
occidental et dans le contexte du conflit israélo-arabe. Les principaux objectifs du
processus de Barcelone ne pourront être atteints qu’à condition que ces questions
trouvent une solution. L’Union pour la Méditerranée ne pourra pas non plus échapper
à ces difficultés ! D’ailleurs, l’Union pour la Méditerranée pourrait favoriser le PEM
si elle tient compte des leçons du processus de Barcelone et de ses échecs, et si elle
fait face aux réalités sans remettre en cause ce qui est déjà accompli.
Dans la version initiale du PEM, la Méditerranée était conçue comme un lien entre
l’Europe et les pays du Levant et d’Afrique du Nord. Elle devait être l’enceinte dans
laquelle la politique de l’Union à l’égard de ces régions serait élaborée. Ce cadre
n’était destiné ni à résoudre les problèmes des États de l’Ouest de l’Adriatique, même
si ces pays faisaient géographiquement partie de la région méditerranéenne, ni à
20
Union pour la Méditerranée : le potentiel de l’acquis de Barcelone
f­ aciliter le processus d’intégration de la Turquie dans l’Union. Si tel avait été le
cas, le concept de la Méditerranée n’aurait été guère autre chose qu’une série hétérogène et sans intérêt d’initiatives à l’intérieur d’une zone géographique unique,
étant donné la variété des politiques que l’Union élaborerait à l’égard de chacun de
ces groupes d’États régionaux.
En revanche, d’autres questions font partie intégrante de l’échiquier politique de la
Méditerranée. Comme cela a été clairement souligné dans la Stratégie européenne de
sécurité en 2003 et dans l’intégralité de la politique de l’Union depuis la déclaration
de Venise en 1980, la résolution du conflit israélo-arabe, et en particulier du conflit
israélo-palestinien, est un élément de la plus haute importance pour la sécurité de
l’Union et incontestablement pour celle de ses partenaires du Sud. Ainsi, pour que
l’Union pour la Méditerranée soit un succès, il faut que le conflit israélo-arabe demeure au centre des préoccupations des États membres. Il s’agit d’un effort commun
qui devrait également mobiliser les énergies des États membres du PEM, bien que les
choses ne soient pas aujourd’hui très encourageantes.
6. L’impératif économique
Dans les années qui ont précédé le lancement du processus de Barcelone, les responsables politiques d’Europe et du Sud de la Méditerranée pensaient que la radicalisation et le sentiment anti-européen du Sud trouvaient leur origine dans les faiblesses
économiques et sociales des États du Sud, elles-mêmes génératrices de niveaux élevés
de chômage et de pauvreté. A leurs yeux, le développement économique de la région
allait donc la stabiliser, endiguer les flux migratoires et empêcher l’Islam politique
de progresser.
De même, on pensait que le développement économique favoriserait la démocratie
dans la région. Cela n’a pas été le cas et cette thèse, qui établissait un lien entre le
développement économique d’une part et la stabilité et la liberté de l’autre, s’est
révélée inexacte. De nombreuses études – en particulier celles menées par le FEMISE
(Forum Euroméditerranéen des InstitutS Economiques) – ont montré depuis qu’il ne
peut y avoir de véritable développement durable sans État de droit et sans libertés
civiles, y compris les droits de la femme. Pourtant, les analyses fondées sur le rôle
prédominant du développement économique et de la coopération commerciale sur
fond d’investissements étrangers demeurent influentes. Elles font même référence au
plan Marshall et au processus d’intégration européenne, bien que ces initiatives se
soient déroulées dans des contextes socio-économiques complètement différents.
En même temps, le développement économique reste un outil fondamental grâce
auquel une communauté euro-méditerranéenne peut être construite à condition que
soient prises les mesures appropriées. Il faut pour cela faire en sorte que la zone de
libre échange euro-méditerranéenne se développe non seulement selon un axe Nord-
21
ISSReportNo.03
Sud mais dans une dimension Sud-Sud tout aussi efficace. Un volet important de l’initiative de l’Union pour la Méditerranée est donc constitué par ses propositions visant
à renforcer la capacité de l’initiative de Barcelone d’entreprendre les grands projets
susceptibles de favoriser la création d’emplois ainsi que la coopération et l’intégration
régionales : extension de la société de la connaissance et de l’innovation, environnement et développement durable, éducation et tout ce qui peut faciliter la mobilité des
étudiants et des chercheurs dans l’espace euro-méditerranéen.
22
Union pour la Méditerranée : le potentiel de l’acquis de Barcelone
III. De nouvelles institutions
euro-méditerranéennes ?
Les propositions relatives aux nouvelles dispositions institutionnelles constituent
elles aussi un volet qu’il convient de prendre en compte. Comme cela a été souligné
plus haut, la proposition initiale présentée à Toulon et à Tanger en 2007 a une nouvelle fois été modifiée, suite à la Déclaration conjointe de Paris du 13 juillet 2008.
Elle englobe désormais tous les États membres de l’Union ainsi que les États du Sud
de la Méditerranée.
Cela revient bien entendu à abandonner complètement les postulats de base sur lesquels reposait l’Union pour la Méditerranée, à savoir une Union qui n’appartiendrait
qu’aux pays du littoral méditerranéen. En d’autres termes, l’Union méditerranéenne,
qui a démarré comme un club exclusivement méditerranéen, présente aujourd’hui, en
termes de membres, les mêmes contours géographiques que le processus de Barcelone. Elle est censée mettre tous les États membres sur un pied d’égalité – les États
du Sud se sont souvent plaints de la domination des Européens.
1. Sommets réguliers des chefs d’État ou de gouvernement (G-Med)
Il a été décidé de créer une sorte de dispositif « G-Med », réunissant les chefs d’État
ou de gouvernement des États concernés : il est certainement possible d’organiser
de façon régulière des sommets des chefs d’État ou de gouvernement euro-méditerranéens, comme cela a été décidé lors du sommet. Il conviendrait d’examiner les
bonnes pratiques, identifiées lors des sommets régulièrement tenus, par exemple,
entre l’Union d’une part et l’Amérique latine, les Caraïbes et les pays d’Asie d’autre
part. Le succès diplomatique du sommet de Paris a montré qu’il existe désormais une
volonté politique claire des deux côtés de la Méditerranée de relancer le processus
de Barcelone.
2. La double présidence tournante
Le principe accepté de double présidence tournante, avec un représentant du Sud
de la Méditerranée et un représentant du Nord, a pour but de refléter l’idée d’une
communauté de prise en charge du processus, sur la base de l’égalité entre les États.
Ce principe est certainement excellent, mais pourrait signifier que l’Union pour la
Méditerranée aura les mêmes difficultés que le processus de Barcelone à trouver une
solution à la réforme institutionnelle du PEM.
23
ISSReportNo.03
Dans le processus de Barcelone, c’est la présidence du Conseil qui joue ce rôle pour les
États membres. Les pays arabes ont, de temps à autre, tenté de parler d’une seule voix
mais ils n’ont pas encore réussi à institutionnaliser cette formule. Par ailleurs, deux
pays non arabes (Israël et la Turquie) sont également membres à part entière du PEM et
il faudrait les inclure dans les États susceptibles de fournir un candidat pour la coprésidence du Sud. On peut douter que les États arabes accepteraient d’être représentés
par Israël dans la mesure où la plupart d’entre eux n’entretiennent pas de relations
­diplomatiques avec ce pays. Pour résumer, l’idée ne peut fonctionner que si la paix a été
auparavant formellement établie entre Israël et les États arabes. Dans le cas contraire,
la rotation naturelle de la coprésidence parmi les États du sud de la Méditerranée impliquerait la reconnaissance d’Israël par les pays arabes avant l’obtention de la paix,
chaque fois qu’Israël occuperait la coprésidence du Sud et il ne fait aucun doute que
certains États arabes ne l’accepteraient pas. L’Algérie l’a d’ailleurs déjà fait savoir.
Par ailleurs, la proposition initiale de la France prévoyait de réserver, au moins à
court terme, la présidence du Nord aux États européens méditerranéens. Cette idée a
finalement été abandonnée. En outre, les États membres seront liés par les nouvelles
règles consacrées par le traité de Lisbonne si celui-ci est ratifié. D’autre part, il est
vraiment nécessaire de renforcer chez tous les États partenaires le sentiment d’être
partie prenante au processus de Barcelone, et donc toute proposition visant à renforcer ce sentiment est certainement la bienvenue.
3. Un secrétariat et un comité permanent basé à Bruxelles
Il convient de noter qu’il n’y a pas eu de secrétariat de Barcelone en tant que tel chargé
de gérer le PEM, étant donné que c’est en fait la Commission européenne qui gère le
processus. Il reste à trouver comment organiser cela concrètement, notamment dans la
mesure où la Déclaration conjointe de Paris contient des dispositions relatives à un
volet administratif, également accessible aux États méditerranéens concernés.
L’idée selon laquelle les partenaires devraient être intégrés dans la gestion quotidienne du processus de Barcelone est certainement intéressante. Toutefois, il ne faut pas
sous-estimer le risque de paralysie en raison des antagonismes entre les partenaires.
De plus, de graves difficultés techniques risquent de surgir dans la pratique, étant
donné l’organisation actuelle des services externes (DG Relex, Aidco) de la Commission
européenne, notamment à cause des changements importants que va entraîner la mise
en œuvre du traité de Lisbonne.
24
Union pour la Méditerranée : le potentiel de l’acquis de Barcelone
Les changements institutionnels introduits par la Déclaration conjointe de Paris peuvent être résumés comme suit :
i.
Le « Secrétariat » occupe une place centrale au sein de la nouvelle architecture
institutionnelle du processus de Barcelone : l’Union pour la Méditerranée. Il
y aura un Secrétaire général et un Secrétaire général adjoint, choisis par
consensus. Selon la Déclaration conjointe de Paris, ce Secrétariat aura « une
personnalité juridique distincte et un statut autonome ». Ses principales tâches seront de :
–faire des propositions pour des initiatives conjointes soumises aux instances politiques et garantir le suivi nécessaire des décisions liées aux
projets ;
–réunir des initiatives de projet, les examiner et suggérer des projets au
Comité euro-méditerranéen qui jouera le rôle de « plaque tournante »
­(clearing house).
ii. Le « Comité permanent conjoint » basé à Bruxelles sera composé de représentants permanents des missions basées à Bruxelles. Selon la Déclaration de
Paris, ce Comité permanent conjoint :
–sera dirigé par les représentants des coprésidences ;
–préparera les réunions des hauts fonctionnaires et du Comité euro-méditerranéen et en assurera le suivi nécessaire ;
–apportera son concours aux présidences pour la préparation des sommets et
des réunions ministérielles thématiques et des affaires étrangères ;
–pourra aussi servir de mécanisme de réaction rapide dans le cas où surviendrait, dans la région, une situation exceptionnelle nécessitant la consultation des partenaires euro-méditerranéens.
L’idée fondamentale de cette nouvelle structure institutionnelle est donc de renforcer
la copropriété, de promouvoir un partenariat plus équilibré et de rendre le « Processus de Barcelone : Union pour la Méditerranée » plus visible. Ces nouvelles structures
devraient en principe être pleinement opérationnelles avant la fin de 2008.
25
ISSReportNo.03
IV. Créer de nouveaux programmes et instruments
Une autre question est celle de savoir quels types d’action ou de programme seraient
favorisés dans le cadre de la nouvelle initiative, et dans quelle mesure ils viendraient
compléter les projets en cours. Six projets ont été sélectionnés par la Déclaration
conjointe de Paris, en l’occurrence :
i.
ii.
iii.
iv.
v.
vi.
Dépollution de la Méditerranée ;
Autoroutes de la mer et autoroutes terrestres ;
Protection civile ;
Energie de substitution ;
Enseignement supérieur et recherche, université euro-méditerranéenne ;
Initiative méditerranéenne de développement des entreprises.
1. Lacunes du processus de Barcelone
Si l’idée est de continuer de se concentrer sur un petit nombre d’actions spécifiques
dans les domaines de l’environnement, des finances et du développement, de l’éducation
et de la recherche, de la culture et de la société et des questions non militaires liées à
la sécurité, par exemple, il ne devrait pas se poser de problème majeur si les conditions
préalables énoncées ci-dessus sont respectées et si l’on prend tout le soin nécessaire
pour éviter les chevauchements avec les programmes existants. D’autre part, de nouvelles initiatives pourraient être envisagées afin de renforcer le processus actuel et de
traiter des questions qui n’ont pas été réglées, ou qui ne l’ont pas été convenablement,
au cours des dix dernières années.
Parmi ces questions, la corruption et le respect des droits de l’homme et de la démocratie doivent être considérés comme des priorités au niveau politique. Il convient de
rappeler que la question de la conditionnalité politique n’a jamais été mentionnée dans
les propositions d’Union pour la Méditerranée. Au niveau économique, la promotion de
l’investissement étranger direct et la question de l’économie informelle méritent une
attention spéciale, étant donné la nécessité pour les partenaires méditerranéens de diversifier leurs exportations. La nécessité de renforcer la dimension sociale du processus de Barcelone et la nécessité d’accroître la coopération sous-régionale Sud-Sud sont
également évidentes. Dans le cadre du volet humain, social et culturel, cette nouvelle
initiative pourrait également servir à relancer l’idée de promouvoir des micro-projets,
laquelle a été abandonnée à la fin des années 1990, sans oublier les questions centrales
de la libre circulation des personnes et les grandes préoccupations du Sud telles que la
santé et le logement.
26
Union pour la Méditerranée : le potentiel de l’acquis de Barcelone
Ce sont des questions importantes qui doivent être traitées si l’on veut que l’Union
pour la Méditerranée apporte une contribution positive à une situation qui s’aggrave dans la région de la Méditerranée. Il est vrai que certains problèmes particuliers constituent des préoccupations fondamentales pour les États riverains, même
si les questions plus larges du sous-développement économique, de la gestion des
frontières communes et des répercussions des crises dans le Sud sont préoccupantes pour l’Europe dans son ensemble. C’est dans ces domaines transméditerranéens
que la proposition du président Sarkozy commence à démontrer sa réelle utilité et
c’est pour cette raison que les idées qu’il a avancées doivent être prises au sérieux,
indépendamment des tensions qu’elles peuvent avoir suscité au sein de l’Union européenne. Il serait extrêmement regrettable que ces idées soient compromises soit par
ces tensions soit par les problèmes politiques auxquels s’est heurté le processus de
Barcelone, et qui ont contribué à son échec relatif.
2. Générer des projets dans la Méditerranée
L’exigence selon laquelle les projets doivent émaner des pays riverains de la Méditerranée eux-mêmes, et donc correspondre aux objectifs qu’ils cherchent à atteindre
en priorité, est tout à fait justifiée. Étant donné que les projets seraient adoptés
au cas par cas et qu’ils dépendent de financements ciblés, cela permettrait d’éviter
dans une large mesure les problèmes bureaucratiques liés aux mécanismes actuels
de financement par l’intermédiaire de processus liés à MEDA8 et aux régimes de prêt
concessionnel de la Banque européenne d’investissement.
L’Union pour la Méditerranée offre un moyen de redynamiser les objectifs de la
­politique euro-méditerranéenne. La clé réside non pas dans les structures qu’elle
propose de créer mais dans le programme de projets qu’elle cherche à promouvoir.
Une autre clé du succès consistera donc à créer de nouveaux mécanismes devant permettre que les propositions de projets émanent aussi des rives méridionales du bassin méditerranéen et non pas seulement de Bruxelles ou des États membres.
3. Coopération euro-méditerranéenne accrue
L’Union pour la Méditerranée est bien entendu autre chose que le simple prolongement du processus de Barcelone : elle est l’occasion d’innover et de créer de nouveaux instruments tels qu’une coopération euro-méditerranéenne renforcée. Elle
représente un nouvel élément moteur pour le processus de Barcelone au sens où plu8. Il s’agit de l’ancien système de mesures d’ajustement qui a été remplacé par l’Instrument européen de
voisinage et de partenariat géré par EuropAid.
27
ISSReportNo.03
sieurs partenaires pourraient prendre l’initiative sur certaines questions revêtant une
­importance particulière, à condition que cette coopération renforcée soit fondée sur
des conditions strictes telles que :
i.
la participation d’un nombre minimum de partenaires à la fois du Sud et du Nord
(ou juste du Sud sur une base sous-régionale) ;
ii. le maintien et le renforcement de l’acquis de Barcelone ; et
iii. la possibilité pour tous les partenaires de participer à tout moment.
28
Union pour la Méditerranée : le potentiel de l’acquis de Barcelone
V. Créer un nouveau mécanisme financier
La méthode préconisée pour financer les projets futurs de l’Union pour la ­Méditerranée,
à savoir un financement au cas par cas combinant fonds publics et privés, s’apparente
à la Banque méditerranéenne de développement que la Tunisie propose depuis longtemps et pourrait bien devenir un mécanisme grâce auquel on pourrait mobiliser des
investissements privés par des partenaires méditerranéens.
Un élément essentiel dans ce cas est que si, par exemple, c’est un investissement privé
provenant des États membres du Conseil de coopération du Golfe qui est sollicité,
ces pays s’attendront à participer à la mise en œuvre, au suivi et à l’évaluation des
projets concernés par le financement qu’ils auront apporté. Avec la réglementation
financière européenne actuelle, cela serait rendu impossible par les fonctions et les
responsabilités de la Commission et des États membres. C’est la raison pour laquelle
le nouveau Secrétariat bénéficie de la personnalité juridique. Les détails techniques de la procédure doivent néanmoins être examinés par les ministres des affaires
étrangères en novembre 2008.
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ISSReportNo.03
VI. Un regard neuf sur les questions clés
Dans les paragraphes qui précèdent, nous avons tenté de montrer qu’il n’existe pas de
solutions simples aux problèmes liés à la construction d’une communauté euro-méditerranéenne, car l’Union européenne, comme ses partenaires du Sud, ont des choix diffi­
ciles à faire. Ces choix tournent autour de quatre grandes interrogations :
i.
ii.
iii.
iv.
Quelle doit être l’orientation de la politique méditerranéenne ?
Comment le cadre de coopération euro-méditerranéenne doit-il être ­structuré ?
Comment lier sécurité et réforme ?
Comment les migrants peuvent-ils devenir des acteurs à part entière du
­partenariat ?
Pour pouvoir apporter une réponse, il faudra également répondre aux différentes problématiques soulevées ces dernières années : l’intégration future du PEM et de la PEV ;
la politique à l’égard des partis politiques islamistes modérés ; les mécanismes permettant à des acteurs externes de stimuler les réformes ; et une politique efficace
concernant le conflit israélo-palestinien et les tensions dans la région au Maghreb et
au ­Machrek, qui constituent des obstacles majeurs à l’intégration régionale. En l’occurrence, l’Union pour la Méditerranée pourrait être l’occasion de poursuivre sur la lancée
de ces débats sans abandonner l’acquis du processus de Barcelone. Elle pourrait donc
devenir le partenaire des institutions de l’Union dans ce débat, car la réforme du traité
constitutionnel, consacrée dans le traité de Lisbonne, même si elle est moins ambitieuse que prévu, prévoit des instruments et habilite les institutions clés de l’Union, en
particulier le Haut Représentant, à organiser un débat constructif sur ces questions.
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Union pour la Méditerranée : le potentiel de l’acquis de Barcelone
Conclusions
Malgré les tensions qu’elle a suscitées dans l’Union européenne, la proposition
d’Union pour la Méditerranée présentée par le président Sarkozy a assurément fait
vibrer la corde sensible des pays de la région du Sud de la Méditerranée et même
de certains États européens du Sud. La raison principale en est qu’elle offre aux
partenaires ­méditerranéens la possibilité de s’approprier une politique commune,
ce qui n’était pas évident dans le Partenariat euro-méditerranéen, malgré le nom
qu’il porte. Dans le cadre de la Politique européenne de voisinage, compte tenu de
sa nature bilatérale, la question ne se pose pas de la même façon et la conditionnalité positive qu’elle implique, conjuguée à la manière dont les plans d’action ont été
élaborés, permet de surmonter en partie cette difficulté. Toutefois, l’absence d’élément horizontal et régional important, si ce n’est en association avec le partenariat,
affaiblit ces avantages.
L’Union pour la Méditerranée, en revanche, s’intéresse très précisément à cette préoccupation. Sa coprésidence, ainsi que sa structure administrative distincte, bien
que sommaire, en sont des manifestations. L’autre aspect important était le mode
de sélection de ses activités selon un programme arrêté en concertation dans toute
la Méditerranée. Aujourd’hui encore, même si elle n’est qu’une des préoccupations
parmi tant d’autres de l’Union européenne, ces caractéristiques subsistent. Elles
montrent combien les intérêts de la Méditerranée et les priorités des États méditerranéens peuvent différer de ceux de l’Union dans son ensemble.
C’est ce qui explique en partie l’intérêt suscité par la proposition initiale du président Sarkozy chez la plupart des États du Sud de la Méditerranée, en particulier
lorsqu’il a souligné que l’avenir de l’Europe se joue aussi en Méditerranée. Après
tout, l’une des plaintes récurrentes des partenaires méditerranéens est la tendance
de l’Union à ignorer ou à minimiser leurs craintes face à la prédominance croissante
de l’Est de l’Europe dans les préoccupations de l’Union.
Même si le rôle de la Commission européenne à l’égard de l’Union pour la Méditerranée a été souligné par le Conseil européen, le succès de cette initiative dépendra en
fin de compte de la capacité des partenaires méditerranéens à faire leur cette initiative. Cette appropriation concerne autant les gouvernements que les populations
du Sud. Ses incidences très particulières sur la manière de gérer la nouvelle Union
doivent être comprises dès le départ, que ce soit en termes de structure administrative ou de sélection et de financement des projets.
Enfin, même si l’idée déplaît à l’Union européenne elle-même, une considération
­importante doit être prise en compte : tant que n’aura pas été instaurée au ProcheOrient une paix véritable, à laquelle toutes les parties puissent souscrire, Israël et la
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ISSReportNo.03
Palestine ne pourront pas fournir de co-président, et les États arabes ne participeront
pas de manière constructive à l’initiative. Mais cette contrainte ne devrait être que
temporaire car, en théorie du moins, toutes les parties au conflit israélo-arabe souhaitent que celui-ci soit résolu. Il en est de même pour la question du Sahara occidental.
C’est seulement lorsqu’elle aura été réglée que pourra être mise en place une véritable
zone méditerranéenne de libre échange.
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Union pour la Méditerranée : le potentiel de l’acquis de Barcelone
Recommandations à court terme
I. Méthode
Lors de l’élaboration du projet, les partenaires devraient :
i. veiller à ce qu’une consultation structurée et transparente ait lieu rapidement
avec les partenaires méditerranéens de façon à ce que le « processus de Barcelone : Union pour la Méditerranée » (PB-UM) puisse reposer sur le principe
de la responsabilité commune ;
ii. préserver l’acquis du Partenariat euro-méditerranéen et l’acquis potentiel
du Partenariat euro-méditerranéen et de la PEV dans la mise en place du PBUM ;
iii. s’occuper des intérêts, préoccupations et enjeux euro-méditerranéens communs et s’attaquer aux véritables questions clés telles que les réformes démocratiques, la libre circulation des personnes et la lutte contre la xénophobie
qui s’inscrivent dans les objectifs du PB-UM.
II. Institutions et programmes
Dans le cadre du développement des institutions et de l’élaboration des programmes
du PB-UM, les partenaires devraient :
i.
adopter le principe d’équité en ce qui concerne les effectifs des deux côtés
de la Méditerranée, avec des représentants du Sud de la Méditerranée qui
occuperaient les postes administratifs de haut niveau dans toute nouvelle institution administrative. Ils devraient fonctionner sur la même base que le
personnel de la Commission, c’est-à-dire qu’ils ne devraient pas tenir compte
des priorités nationales dans l’exercice de leur profession ;
ii. créer un secrétariat du PB-UM qui soit compatible avec le rôle de la Commission européenne et créer des groupes de travail et comités euro-méditerranéens communs afin d’associer des experts et des représentants de la société
civile à l’élaboration des projets. Ces innovations devraient tenir compte du
rôle de la Commission européenne dans le Partenariat euro-méditerranéen
et dans la PEV. Cela éviterait également la création de structures purement
intergouvernementales ;
33
ISSReportNo.03
iii. s’inspirer de l’esprit des projets d’infrastructure créés par le « Paquet Delors ».
Les comités de sélection des projets devraient comprendre les partenaires méditerranéens également, et une conférence de donateurs devrait être organisée
pour mobiliser des fonds ;
iv. renforcer la légitimité et la représentativité de l’assemblée parlementaire
d’Euromed et veiller à ce que la fondation Anna Lindh contribue à l’autonomisation de la société civile et au pluralisme dans le domaine culturel.
III. Faire face aux risques potentiels
Afin d’éviter les risques potentiels qui compromettraient les objectifs du PB-UM, l’UE et
ses partenaires méditerranéens devraient :
i.
veiller à éviter la dilution de l’acquis de Barcelone et de la PEV, en particulier
en ce qui concerne les aspects politiques, et la substitution du Partenariat euroméditerranéen et de la PEV par l’Union pour la Méditerranée ;
ii. envisager des mécanismes devant permettre d’éviter que le nouveau cadre
conduise à renoncer aux mesures d’encouragement des réformes politiques déjà
élaborées dans le cadre du PEM et de la PEV ou à s’écarter des principaux enjeux
socio-économiques et politiques de la région méditerranéenne ;
iii. s’assurer que la conditionnalité positive de la PEV privilégie le respect de l’État
de droit et l’évolution vers la gouvernance démocratique ;
iv. empêcher que les nouvelles structures créées entraînent une paralysie du Partenariat par l’introduction de nouvelles complexités dans le processus de décision ;
v.
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prévenir le risque de marginalisation des sociétés civiles dans l’élaboration, la
mise en œuvre et le suivi des projets.
Union pour la Méditerranée : le potentiel de l’acquis de Barcelone
Note sur les auteurs
Roberto Aliboni est vice-président de l’Istituto Affari Internazionali (IAI) à Rome et directeur du programme de
l’Institut sur la Méditerranée et le Proche-Orient. Il a enseigné l’économie internationale à l’université de Naples et
à celle de Pérouse de 1972 à 1979. Il a occupé des postes de chercheur dans différents instituts. Il est actuellement
co-président de l’assemblée générale d’EuroMeSCo et membre du conseil scientifique du TAPRI (Tampere Peace
Research Institute). Il a publié de nombreux articles et ouvrages.
George Joffe enseigne au Centre of International Studies de l’université de Cambridge. Il occupe également un
poste de chercheur au Centre of Islamic Studies de l’université d’Oxford, un poste de professeur au Centre of Global
Studies à la London Metropolitan University ; il est professeur invité au King’s College à l’université de Londres. Il a
été auparavant directeur-adjoint et directeur par intérim du Royal Institute of International Affairs (Chatham House)
à Londres.
Erwan Lannon est professeur à l’université de Gand et au Collège d’Europe (Bruges et Natolin). Il est chercheur
associé à l’Institut d’Etudes de Sécurité de l’UE, membre de la Commission d’étude euro-méditerranéenne et co-titulaire de la chaire de réformes politiques, administratives et internationales à l’université de Louvain-la-Neuve.
Azzam Mahjoub est professeur d’économie à l’université de Tunis El Manar. Il est également conseiller aux niveaux
international (PNUD, CNUCED, UE, EuroMeSCo, Plan bleu pour la Méditerranée [PNUE]) et national (ministère de
l’environnement, ministère de l’éducation, ministère du développement économique, ENDA, Union tunisienne du
travail, Association des villes tunisiennes, Association des études internationales). Il a été l’un des principaux collaborateurs du premier rapport arabe sur le développement humain (PNUD) et de l’élaboration de la stratégie méditerranéenne pour le développement durable (PNUE).
Abdallah Saaf est Directeur du Centre d’études et de recherche en sciences sociales de Rabat et professeur de
sciences politiques à l’Université Mohammed V. Auparavant, il a été doyen de la faculté de sciences juridiques,
économiques et sociales, ministre de l’éducation nationale, président de l’Association marocaine de sciences politiques et président du Forum civil démocratique marocain. Il est directeur de la revue marocaine de sciences sociales
Abhath et l’auteur de nombreux ouvrages, dont L’Espérance de l’État moderne du Maroc.
Álvaro de Vasconcelos est Directeur de l’Institut d’Etudes de Sécurité de l’UE depuis mai 2007. Il a dirigé, de 1981 à
2007, l’Instituto de Estudos Estratégicos e Internacionais (IEEI) à Lisbonne, dont il est le cofondateur, et où il a lancé
plusieurs réseaux dont le Forum euro-latino américain et EuroMeSCo.
Éditorialiste dans la presse portugaise et internationale, il a écrit et codirigé de nombreux ouvrages, articles et
rapports, notamment sur la Politique étrangère et de Sécurité commune de l’UE (PESC), sur les relations euro-méditerranéennes et sur l’ordre mondial, entre autres : Portugal: A European Story, La PESC : Ouvrir l’Europe au Monde,
The European Union, Mercosul and the New World Order, et A European Strategy for the Mediterranean.
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European Union
Union européenne
Institut d’Etudes de Sécurité de l’Union européenne
www.iss.europa.eu • [email protected]